» Pharaons sans papiers « 

I) – « La calomnie n’est pas d’aujourd’hui… » Dictature à visage humain…

Frances Cress Welsing écrit, à juste titre, que le système d’oppression globale qu’est la suprématie blanche maîtrise depuis longtemps les processus qui la conduisent à nous mettre perpétuellement en échec ( « The Isis Papers » ).[page]

( Frances Cress Welsing )

Socialement, dans toutes les sphères de l’activité humaine, cette efficience se vérifie. Idéologiquement et philosophiquement également. Qui promeut la démocratie, les droits de l’homme, de la femme et de l’enfant ?

Qui s’occupe de notre « bien être » écologique et humanitaire, voire spirituel ? Sur quelle épaule allons-nous pleurer toute la misère du monde avant qu’elle ne coule à pic ou n’échoue sur les opulents rivages d’occident ?

Qui se charge « d’éduquer » nos enfants pour les garder fidèlement dans l’enclos du « meilleur des mondes », sous la bien consciente surveillance de leurs prétendus « tous pareils » ?

II) – Le contrôle des connaissances…

Mais le domaine dans lequel la suprématie blanche excelle à nous mettre en échec, est celui de l’instruction ( scolarisation ) et de la transmission des savoirs.

Elle contrôle l’ensemble de la Connaissance, monopolise les expertises et les vulgarisations, se fait seule voix professorale pour l’humanité entière. Et tout ce qu’elle sait – ou croit savoir – est délivré comme une vérité essentielle que chaque partie du monde humain est fortement encouragée à suivre, à imiter, à glorifier.[page]

La suprématie blanche est foncièrement manipulatrice et perfide.

C’est pourquoi elle sanctionne toute démarche qui ne va pas dans le sens de cette véritable déification de son empire sur le monde.

Le cas de l’égyptologie est, à cet égard, significatif…

III) – Mensonges égyptologiques…

L’égyptologie occidentale est une science mensongère puisqu’elle a choisi d’ignorer, dès sa fondation, l’essence même de la réalité « égyptienne » : son appartenance totale, intégrale au monde négro-africain.

Elle a pris comme option de plaquer ses philosophies antikémites sur l’univers le plus kémite qui soit : la plus ancienne des civilisations humaines, érigée par nos Ancêtres.[page]

( Toutânkhamon )

Une fois ce postulat de négation du Noir posé, l’égyptologie occidentale a décidé de ne plus être une science, mais une idéologie.

Et comme elle est une idéologie de la mort et de la stérilité du monde Nègre, elle passe son temps à se paraphraser, à radoter, à traquer les raisons de son pourrissement intellectuel ailleurs que dans son corps en décomposition.

Elle passera donc son temps dans le trouble mental le plus absolu, cherchant à couper, par toutes sortes de subterfuges, Kemet de son âme négro-africaine.[page]

( Anubis )

Une position intenable mais qu’elle réussit à tenir par la plus spectaculaire des acrobaties : l’idéologie n’existe que chez les « Autres », les forgeurs de mythes de l’histoire « compensatoire » qu’ils appellent « idéologues de l’afrocentrisme ( ou des afrocentrismes ) ».

C’est-à-dire que ceux qui ont été ( et sont ) les créateurs du plus grand des mythes de l’histoire humaine, la suprématie blanche, ceux là même qui ont systématisé la plus grande des fumisteries en matière d’histoire compensatoire, puisque leur histoire serait née d’un « miracle », ex nihilo – et du néant, aurait continué de féconder la terre de ses aventuriers, prêtres, soldats et putains – disent, aujourd’hui, qu’il est déraisonnable de se « fabriquer un passé ».

Sauf que nos Eveilleurs ne « manufacturent » pas de passé… ils lui redonnent sa réalité, tout simplement.

Et je crois très fortement que nous, les Noirs, devons absolument cesser, aussi bien pour notre santé mentale que pour notre propre intégrité intellectuelle, de suivre le joueur de flûte occidental et ses contes à dormir debout ( je ne parle pas ici des scientifiques de bonne foi, chers à Cheikh Anta Diop ).[page]

Aucun blanc ne fait du Noir la base de sa vision du monde. Aucun, même pas nos amis ou nos femmes ou nos maris, pour ceux et celles qui ont suivi leur cœur qui a des raisons que la raison ne connait pas.

Aucun blanc, fut-ce le plus « antiraciste », ne construit son univers mental et intellectuel sur la weltanschauung d’un Noir.
Contrairement au Noir qui continue de vouloir trouver dans les élucubrations de la suprématie blanche, un sens à son histoire. Et, plus grave, à sa vie.

Les mensonges de l’égyptologie occidentale continuent aujourd’hui. Elle a même fait quelques contorsions intéressantes depuis qu’elle a décidé que « l’Egypte » était hors du Nègre et de l’Afrique.

Elle pense avoir trouvé la chambre secrète de Cheops.

Elle organise des expositions sur la plus grande civilisation Nègre à… l’Institut du Monde arabe, puisqu’il aurait existé des « proto-égyptiens pré-islamiques » ( en clair, des gens qui, n’étant pas Noirs, auraient pourtant décidé de se nommer collectivement « Nègres », bien que premiers arabes ou berbères ).

Les grecs auraient eu des hallucinations bien compréhensibles, car découvrant une « civilisation nouvelle », victimes d’aveuglement, d’enthousiasme – ou d’éthylisme dionysien avancé – ils auraient un peu forcé le trait et écrit de véritables fables d’Esope sur l’importance supposée de la civilisation
« égyptienne », ses fastes, sa grandeur intellectuelle et la renommée de ses maisons de vie.[page]

Ce que les mythologues blancs appellent « égyptomanie », qui, comme bien des maladies qui putréfient l’humanité, sont élaborées dans les bennes à ordures de l’éminence blanche.

Et le plus grand de ces mystificateurs grecs aurait été le père revendiqué de l’histoire occidentale, Hérodote, qui, encore plus pété que les autres Platon, Aristote, Pythagore, Euclide, Solon, Thalès, Eudoxe, Plutarque, Diodore de Sicile… ) aurait même raconté la « connerie » suprême : que les
« égyptiens » étaient Noirs.

Même pas « métis », « rouges », « bruns », « chamito-hamites » ou « sémites », non. Noirs comme le charbon de bois, cheveux crépus, bouches lippues.

Comme ces témoins qui font des interprétations multiples du même événement, ces aïeuls dont on est d’ordinaire si fiers, précurseurs de la miraculeuse extraction du génie blanc, de cette Grèce qui aime tant ( la Raison ) hellène et les garçons ( la procréation par l’esprit ), se seraient heurtés, dès l’antiquité, à la « question noire ».

Cette problématique « présence d’ombre » bien connue des ségrégationnistes d’aujourd’hui.

Ces glorieux ancêtres à la vue basse, à l’étrange daltonisme qui leur ont fait voir des Noirs civilisés là où ils n’étaient « qu’obscurs », n’ont pu que se tromper, confondre, ne pas reconnaître le blanc sous la peau noire. Une incompréhensible cécité ou la surprise exaltée de voir des Noirs apparaître dans le spectre humain.

Des « tares » que leurs admirables descendants se doivent, depuis lors, de… « corriger », de « raisonner », de « nuancer » ( en matière de couleur, c’est normal ). D’ajuster à la réalité probable de l’époque, laquelle, paradoxalement, aurait été la même que celle d’aujourd’hui : blancs, sémites, asiatiques supérieurs et nègres agglomérés en tribus, inférieurs, colonisés, « intégrés » ou « métissés ».

Les « égyptiens » n’auraient pas inventé l’écriture, car la forme cunéiforme préexistait aux « Medou Neter », là bas dans le bassin de la Mésopotamie ( ancêtre de l’Irak actuel, sans Saddam Hussein, mais avec quelques civilisateurs à la peau blanche ou brune, aux crinières blondes ou rousses, venues ensemencer les contrées sous-développées ).

Les « égyptiens » n’auraient été que des paysans, c’est-à-dire des péquenots : agriculteurs, artisans, pécheurs. Des gens simples, habiles de leurs mains et vivant en vase clos, bons sauvages, heureux à l’ombre de leurs tombeaux triangulaires.

Plutôt habitués à l’activité manuelle, les « égyptiens » n’étaient pas des forts en thème : chez eux, pas de philosophie, de mathématiques, de littérature, de médecine. Rien que des manches de houe et des têtes de pioche.[page]

Chanceux enfants au bord du Nil, ils avaient une multitude de dieux primitifs, comme autant d’artefacts de religion « bantoue ». Fétichistes de la végétation, des crues du Grand Fleuve, comment auraient-ils pu inventer une si grande et belle chose que le monothéisme, réservé au peuple « élu » ?

Bien que pas Nègre ou si peu, Pharaon aurait été un chaud lapin qui sautait allègrement ses concubines dans des harems où régnait une bien compréhensible hystérie du complot.

La débauche et la corruption étaient d’ailleurs habituelles sous ces tropiques, surtout au plus haut sommet du Royaume, car le frère épousait sa sœur pour préserver de toute souillure le Sang Divin. Une pratique détestable connue sous le nom « d’inceste royal » ( coutume que l’Europe des dynasties consanguines ignorait et ignore ).

Les « égyptiens » auraient pratiqué des sacrifices humains ( pas Nègres ou si peu, mais déjà
cannibales ).

C’est en « Egypte » que la peste aurait connu ses premières manifestations ( la peste, c’est-à-dire le sida ou l’ébola de l’antiquité ).

Pour finir, l’égyptologue blanc, malade de ses certitudes, convaincu que rien ne peut échapper à sa sagacité supérieure, prévient :
il faut prendre avec des pincettes ce que disent les « égyptiens » d’eux-mêmes, car, comme tout peuple « magique », leurs textes sont plus motivés par l’efficacité rituelle que par la vérité ou la fiabilité scientifique, apanage de l’occident, inventeur de la raison raisonnante, des méthodes d’investigation infaillibles et des concepts finis.

Le message est ainsi clair pour l’ensemble des Nègres qui veulent baser leurs humanités classiques sur les antiquités kémito-nubiennes :
« l’Egypte » dont vous vous réclamez, la voilà démystifiée, atomisée, momifiée, ramenée au rang de pays sous-développé, sinon en voie de développement, incapable de challenger efficacement le
« miracle » eurocentrique.

Mais même cette « Egypte » désacralisée, à cheval entre les peuples et les mondes, n’est pas faite par et pour les Noirs. Elle continue d’être, dans le cerveau électronique blanc ( reproducteur de son propre délire ), une « terre noire fertile au bord du Nil », en éclatante contradiction avec la vision autochtone.[page]

IV) – Les pharaons Noirs sans papiers…

Mais le clou du spectacle, la sénilité de l’art, le summum de l’histoire en falsification perpétuelle, c’est que, devant les preuves de moins en moins réfutables de la négrité phénotypique et génétique, culturelle de Kemet ( le vrai nom de l’ancienne Egypte ), et la peur que leur inspire la confrontation scientifique avec les Nègres qui se sont émancipés de leur dictature académique, les fabulateurs de l’égyptologie occidentale ont inventé la pirouette suprême : « les Pharaons Noirs sans papiers ».

Les « Pharaons Noirs de Nubie », dont on ne sait rien des origines, de la langue et de la civilisation. Le trou noir, quoi…

Comme la suprématie blanche est, à la fois, une doctrine réfléchie et une pathologie mentale, une insanité au sens strict du terme, expression de la terreur d’être annihilé, conscience d’une fragilité génétique et intellectuelle ( non pas que le blanc ne soit pas intelligent ; mais il n’est pas réellement ce qu’il prétend être : un miracle d’intelligence ), sa norme symbolique, la « fabrique du mensonge », se met à élucubrer de nouveau.

Certes, il y a eu des « Pharaons Noirs », quelque part en Nubie, mais s’ils ont pu bâtir ces édifices, cette organisation politique et économique, s’ils ont pu faire preuve de génie militaire, c’est qu’ils étaient fortement « égyptianisés ».

C’est-à-dire que comme nous, leurs descendants, ils n’ont pu parvenir à une quelconque évolution qu’en étant colonisés. Koush, Napata, Méroé, Kerma, tout cela n’a été possible que parce que des
« tribus » nubiennes ( noires ), venues de ce « vil pays de Koush », terre de sauvagerie et de ténèbres, ont été dominées culturellement, politiquement et religieusement par « l’Egypte », bien entendu non-Nègre, oscillant plutôt entre Proche-Orient et Asie.

En Nubie, avant la colonisation égyptienne, tout était… primitif. Puis, l’Egypte ( mi-orientale, mi-asiatique, mi-blonde, mi-rousse, mi-rouge, mi-blanche, et peut-être un peu brune ) est arrivée, à l’instar des nations « civilisatrices » occidentales, apporter ses « Lumières ».

« L’Egypte » devenant décadente, les « Pharaons Noirs », un peu comme les despotes africains actuels qui transposent des modèles de sociétés occidentaux, la font revivre de l’autre côté des « déserts brûlants où personne ne s’aventure ». Bref, « une sombre fédération de tribus nubiennes va donner naissance à un royaume » grâce à l’imprégnation égyptienne.

Les Nubiens qui « baisaient la poussière des sandales de Pharaon » singent Pharaon lui-même, comme Bokassa l’a fait en se prenant pour Napoléon.[page]

Les futurs « Pharaons Noirs » sont élevés à l’école coloniale égyptienne et vivent près de leurs mères, épouses secondaires et autres concubines colorées, puisque les vrais « égyptiens », les vrais Pharaons, sont devenus blancs à force d’être métissés ( c’est d’ailleurs la finalité du métissage : blanchir le Nègre, c’est-à-dire et concrètement, l’effacer ).

La fusion culturelle ainsi acquise ( aujourd’hui, l’on nous parle « d’intégration », « d’assimilation », de
« diversité » ) permet à ces Pharaons aux origines « énigmatiques », d’être califes à la place du calife.

Ces « sans papiers prestigieux », ces illégaux aux pyramides à pentes raides, « traits accentués, nez lourds, pommettes marquées, lèvres épaisses, mentons volontaires », auraient été effacés de tout souvenir par Psammétique II, sans doute hostile aux culs nègres assis sur le trône d’Osiris. Après tout, il ne s’agissait que de « parure égyptienne » et non de « civilisation propre ». Civilisation qu’aucune
« tribu nubienne » n’était en mesure, ni de créer, ni de rendre « éternelle ».

Ainsi, si les « afrocentrismes » voulaient limiter leurs prétentions « revendicatrices » à ces quelques fantômes pharaoniques, illustres inconnus du « passé africain », la sainte église blanche et universelle de toutes les sciences académiques n’y verrait aucun inconvénient… Et par souci fraternel, mettrait même à la disposition des intellectuels des nouvelles « tribus nubiennes » ses bases de données et ses documents à la fiabilité problématique.

Si les Noirs ne pouvaient se réclamer que de peuplades de grands singes en attente d’évolution, adeptes de l’anthropophagie, de la licence sexuelle et de quelques carnages sanguinolents, la « science » occidentale leur laisseraient sans aucune difficulté cette ascendance, qui serait dans l’ordre des choses.

Qu’ils se réclament maintenant d’une civilisation ( et non plus d’une ethnie ), civilisation si grande qu’elle rayonne encore aujourd’hui, alors là, on y est plus. Cette « mémoire de compensation » dépasserait même les bornes de la décence « universelle », tellement, qu’il faudrait la corriger de la seule manière possible : selon l’épistémologie et la méthodologie occidentales, ses conventions et ses chronologies.

Un Noir qui dit que ses humanités classiques sont kémito-nubiennes, doit démontrer qu’il sait lire et écrire les Hiéroglyphes.

Mais, jamais, il n’est demandé à un blanc, qui se prétend miraculé greco-romain, de prouver cette prestigieuse hérédité. D’écrire, de s’exprimer ou de lire dans le texte, le grec ou le latin.
Se réclamer des grecs, des romains, des gaulois ou des sémites va de soi.

Se réclamer des « égyptiens » ( surtout quand on est Nègre ) est un sacrilège, même chez certains Noirs qui sont devenus par la force de la programmation antikémite, experts de leur propre marginalisation.[page]

Ils se posent même la question de « l’ambiguïté des afrocentrismes », parlant de « discours de la haine et de la négation de l’autre », de « nihilisme total », « d’enfermement dans le cercle vicieux » de la revendication spéculative, « d’auto flagellation », de « victimisation », « d’idéologie revancharde et suspecte », de « contrastes manichéens » et de « thérapie ». Rien que ça.

Mais de quoi parlent-ils au juste : d’Afrocentricité ou d’afrocentrisme ?

V) – Afrocentricité et afrocentrisme (s)…

L’emploi, par ces Noirs, des termes « afrocentrisme » ( singulier ) et « afrocentrismes » ( pluriel ) est assez symptomatique de leur obédience qui les placent, sans conteste, dans l’une ou l’autre des trois catégories identifiées par Molefi Kete Asante :

a) les « capitulationnistes » : Noirs qui ne peuvent et ne veulent pas occuper de position de sujet dans le monde.

b) Les « loyalistes européanisés » : Noirs qui croient à l’incapacité « naturelle » des Africains à produire des savoirs consistants.

c) Les « masqués » : Noirs troublés qui donneraient tout pour renier leur identité, mais qui se rendent compte que cette attitude leur coûterait une marginalisation tragique. Alors, ils cherchent des positions médianes, des positions d’arbitrage entre les deux camps.

Les termes « afrocentrisme » ou « afrocentrismes » ne sont pas employés par les Africains qui travaillent à la réelle Régénération de notre Peuple. Nos Eveilleurs parlent d’Afrocentricité qui a pour objectifs, non pas l’insulte, la querelle, la compensation, ou la thérapie, mais :

1/ l’unité africaine.
2/ La lutte contre l’aliénation culturelle, résultat des années d’oppression.
3/ Le retour de l’Androgynie Sacrée ( la parité-complémentarité-union homme-femme Noirs ).
4/ La revitalisation des humanités classiques africaines.
5/ Le rayonnement de l’Afrique sur le plan international.
6/ La reconnaissance de l’origine Nègre de l’humanité et de la civilisation pharaonique.
7/ La lutte contre l’eurocentrisme universel et dogmatique.
8/ Le respect des valeurs fondamentales de l’humanité.

Ceci pour un but précis : la Renaissance Africaine.[page]

L’Afrocentricité nous ( Râ ) mène à nous-mêmes. Et comme le dit Aimé Césaire, c’est « un tremblement de concepts, [un] séisme culturel […] une entreprise de réhabilitation de nos valeurs par nous-mêmes, d’approfondissement de notre passé par nous-mêmes, du ré-enracinement de nous-mêmes dans une histoire, une géographie et dans une culture, le tout se traduisant non pas par un passéisme archaïsant, mais par une réactivation du passé en vue de son propre dépassement »
( « Discours sur la Négritude », pp. 85-86 ).

L’Afrocentricité est pensé comme le seul instrument conceptuel viable pour la libération effective des Nègres ( continent et « diaspora » ).

Quant à « l’afrocentrisme », il n’a aucune intimité avec l’Afrocentricité. La « centricité » dont il est question ici, est le pouvoir d’être sujet de sa propre destinée historique, politique, sociale, culturelle, économique, et n’a rien à voir avec l’égo « centrisme ».

Une définition de « l’afrocentrisme »

VI) – Alors, qu’est ce que « l’afrocentrisme » ?

Arthur Schlessinger, un des grands eurocentristes impénitents, donne cette interprétation de leur nouvelle arme de « violence organisée » : « [ l’afrocentrisme se propose de ] donner aux Africains et à leurs descendants, un prestige historique contestable ».[page]

Un « afrocentrisme » que la suprématie blanche rend pluriel, à l’image des prétendues subdivisions « tribales » et de « teintes de peau » qu’elle croit discerner chez nous. Clivages qu’elle peut décliner et opposer à loisir. En attendant que nous nous massacrions pour son plus grand profit.

Le blanc aime mettre les « Autres » dans des ghettos, des enclos, des limitations ( des délimitations ), dans lesquels il peut étaler la terrible folie de ses symboles.

VII) – La prépondérance historique des Noirs n’est pas discutable…

Cette réalité est tellement évidente, stressante, que les « romanciers de l’histoire » occidentaux se sont crus obligés de la travestir. Ce qui est contestable, par contre, c’est la prétention blanche à se revendiquer « seule Raison dans l’Histoire ». A se revendiquer « moteur » de l’Histoire, les « Autres » représentants de l’espèce humaine étant – ou restant – à découvrir. A définir. A nommer. A catégoriser.

Cette définition de Schlessinger, qui n’en est pas une, donne une apparence scientifique à ce qui n’est que du vulgaire antikémitisme, tout en précisant le dessein global de la vulgarisation des termes
« afrocentrisme » et « afrocentrismes » :

refuser aux Noirs, en tout temps, en tout lieu, toute civilisation, toute indépendance, toute intelligence.

VIII) – Nous, nous proposons l’exégèse suivante…

« L’afrocentrisme » est :

1/ une donnée idéologique de la suprématie blanche qui a pour mission d’interdire aux Noirs de vivre leur continuité historique, de se rattacher à la civilisation et non plus à l’obscurité primitive et
« pré-humaine ».

2/ Une co-substance de la doctrine antikémite qui vise à évincer le peuple Noir du génie humain pour le garder dans la servitude, la soumission et l’exploitation.

3/ Une expression de la haine, du mépris, de la condescendance, et même de la peur qu’éprouvent les thuriféraires de la prépotence blanche ( relayés par les « capitulationnistes », les « loyalistes européanisés » et les « masqués » ) à l’égard de la rupture épistémologique opérée par les Africains, devenus sujets de leur histoire ( normes, pratiques, interprétations, définitions ) et de l’Histoire.

4/ Un égo-eurocentrisme qui refuse aux Noirs toute importance, toute autorité et tout rôle historique, si celui-ci n’est pas subordonné à l’existence préalable de peuples civilisateurs : blancs, sémites ou asiatiques.[page]

5/ Une modalité de la mauvaise foi blanche qui refuse à Kemet ( l’Egypte antique ) sa Maternité Négro-Africaine, sous prétexte que « l’Egypte Nègre » est une invention de la tradition grecque.

L’influence historique et civilisationnelle est l’apanage gobino-hégelien des peuples blancs et assimilés, qui créent, impulsent et pensent l’histoire totale de l’humanité, si ce n’est son sort.

6/ Un champ de perversion et de putréfaction à prétention universitaire censée perdre nos Eveilleurs en vaines et sempiternelles querelles, où se répandent sans vergogne un certain nombre d’idéologues blancs aux savoirs aussi « primaires » que les soi-disantes « tribus » qu’ils muséographient. Idéologues de la suprématie blanche qui considèrent avoir des conseils à donner et, surtout, des connaissances opératoires à transmettre.

Malheureusement pour eux, et heureusement pour nous, l’occident n’est plus le seul lieu où se pense et s’écrit le passé, le présent et l’avenir de l’Humanité.

IX) – Question de localisation…

Pourtant, aujourd’hui encore, certains Noirs continuent de se méfier de « l’afrocentrisme », comme le blanc lui a dit de le nommer. Continuent de le trouver « exagéré », « sectaire », voire « nocif ». Pour le Noir « universel », c’est-à-dire localisé jusqu’à la moelle sur la culture occidentale qui le conditionne et le formate, il est naturel de n’avoir de rôle dans l’histoire que celui du laquais fier de l’intelligence de son « maître », de sa bonté, de la beauté de sa maison ou de sa capacité à se projeter hors des limites de l’atmosphère terrestre… Objet ébahi et non pas Sujet Actif.

Ces Noirs s’abandonnent avec fidélité à la « Raison » blanche pour s’éloigner, avec une belle constance et une inimaginable bêtise, de ce que la suprématie blanche mégalomane et mythomane appelle
« l’afrocentrisme » ( ou les « afrocentrismes » ), « émotion prélogique nègre » devenue prétentieuse à force de se regarder l’ombilic.

A s’éloigner en fait de la seule manière possible de gagner sa totale liberté : l’Afrocentricité. Se nommer soi-même, s’affirmer et s’assumer en tant que Peuple et déterminer, seul, son Lumineux Destin.

Alors, quelques « Pharaons Noirs » perdus, déjà bien pénétrés de leur « retard culturel », passe encore. Des « Pharaons Noirs », du début à la fin de l’histoire glorieuse de Kemet, c’est inconcevable : c’est même de l’égyptomanie. De l’idéologie, pas de la science.

Or, reste à résoudre la question cruciale : s’il existait des « Pharaons Noirs », uniquement en Nubie, de quelle couleur pouvait donc bien être les Pharaons des nombreuses dynasties qui se sont succédées à la tête de Kemmiou ?[page]

Certainement de la famille des Rois « roux » et des Reines blondes… A moins qu’ils n’aient été issus des « populations très métissées » qui vivaient aux bords du Nil.
Si les blancs le disent…

X) – Règle et exception…

L’égyptologie occidentale reste fidèle à elle-même :

1/ une règle : des Pharaons « mélangés », mais à prédominance proche-orientale, asiatique ou blanche. Une civilisation par certains côtés merveilleuse, magique, mais plutôt banale comparée à la Grèce et à Rome, inventeurs de la démocratie, de la philosophie, de l’esclavage raisonné et de la non-condition de la femme.

Une « Egypte » hors de l’Afrique obscure des Nègres, proche de « l’universel » et du
« métissage », c’est-à-dire de l’hypertrophie blanche en ses fétides idéologies.

2/ Une exception : quelques Nègres évolués, élevés par leurs colonisateurs « égyptiens », eux-mêmes très différents du « reste de l’Afrique ».

N’est-ce pas plus réel, plus scientifique, plus objectif que d’aller aux fraises chercher une « Afrique Fondamentale », « Essentielle », « Originelle », « de compensation », mère du monde, de l’homme et des sciences ?[page]

XI) – Notes… :

1- Lire l’œuvre entière de cheikh Anta Diop et de Théophile Obenga, les « cahiers carribéens d’Egyptologie », sous la direction d’Alain Anselin, ainsi que « les chemins du Nil », Aboubacry Moussa Lam, Présence Africaine/Khepera, 1998.

2- Voir Historia, Octobre 2004, et particulièrement le dossier consacré à Pharaon.

3- Dans le sens où, en conscience, ils relaient des mensonges avérés et sont au service d’un système de subjugation.

Kotto Christian, Ecrivain