Poursuivons la discussion avec Jean Philippe Omotunde à l’occasion de la publication de son ouvrage détonnant : « La traite négrière européenne : vérité & mensonges » ( seconde partie )
AfricaMaat : Nous souhaitons encore en savoir plus sur la traite, notamment vis à vis des princes marchands d’esclaves africains ?
Jean Philippe Omotunde : Il est important d’en parler en effet.
AfricaMaat : On parle beaucoup de princes marchands d’esclaves africains ayant vendu des captifs aux négriers. Peut-on en savoir plus ?
JPO : Pour que le trafic se développe, il fallait sur le terrain des collaborateurs efficaces et serviles.
Les Portugais eurent alors une idée diabolique, capturer de jeunes africains le long du littoral, les éduquer au Portugal afin qu’ils maîtrisent la langue, leur donner une éducation raciste et les réintroduire avec une logistique lourde en Afrique pour gagner leur liberté en livrant des captifs.
Sur ce point, le témoignage du vénitien Ca da Mosto au service de la couronne en 1453, est clair :
» Certains esclaves, une fois qu’on les avait baptisés et qu’ils parlaient la langue de leur maître étaient embarqués à bord des caravelles et envoyés auprès de leurs congénères. Ils devenaient des hommes libres après qu’ils avaient ramené quatre esclaves « .
Et oui 4 captifs contre sa liberté, tel était le deal avec les Portugais. Cela, les historiens européens ne le disent pas car ils veulent brouiller les pistes.
AfricaMaat : C’est ahurissant ce que vous dites ?
JPO : Malheureusement, il y a pire. Espagnols et Portugais vont par la suite » larguer » en Afrique tous les rebuts de leur société ( criminels, voleurs de toute espèce, etc… ) et des personnes persécutés pour diverses raisons.
On forcera des femmes noires à mettre alors au monde des métis qui seront éduqués dans la haine des nègres pour mener à bien les razzias et le commerce négrier avec l’aide de la logistique militaire occidentale ( armes à feu, poudre à canon, fort militaire… ). L’île de Sao-Tomé est l’exemple par excellence de ce fait. Cette île stratégique, fut érigée en capitainerie et offerte à J. de Paiva en vertu d’une lettre ‘ foral ‘ émise le 24 septembre 1486 par le roi du Portugal. Georges Kay atteste que les Portugais y introduirent par la suite » Une population principalement composée de juifs originaires du[page]
Portugal, qu’ils avaient choisi de fuir en ces temps de persécutions raciales et religieuses ; à ces exilés volontaires s’ajoutaient les criminels déportés et enfin les métis qui, au début du XVIème siècle, commençaient à se faire nombreux.
Criminels et métis, gens endurcis, traitant les esclaves avec une grande cruauté, au point que ces derniers se révoltèrent en masse à plusieurs reprises « . Les faits sont là !
AfricaMaat : A-t-on d’autres témoignages sur ce type de pratique ?
JPO : Parfaitement. Le Portugais Latour da Viega Pinto a par exemple encore avoué que » Les premiers colons de l’Ile furent des déportés et des enfants juifs convertis, des ‘ nouveaux chrétiens ‘ que l’on maria à des esclaves importées de la Côte de Guinée d’abord puis du Kongo. Cette société de métis allait se convertir rapidement en trafiquants d’esclaves lorsque les habitants de Sao Tomé eurent obtenu du roi ( du Portugal ) le privilège ‘ du rachat ‘, sur les côtes africaines en face de l’archipel « . Encore une fois, les faits sont là !
AfricaMaat : Donc les princes marchands d’esclaves que l’on présente aux jeunes sont issus de ce processus ?
JPO : Je vais laisser parler Adam Horchschild à ma place. Voilà ce qu’il reconnaît :
» Ce sont évidemment, ces ( métis ) Portugais, princes marchands d’esclaves que l’Occident et ses propagandistes présentent à l’humanité comme des rois nègres. La jonction des métis rabatteurs de[page]
Sao Tomé aux botanistes portugais produisit un choc aux conséquences désastreuses sur la société africaine « . En masquant la réalité des faits, l’objectif visé est de culpabiliser les Nègres.
AfricaMaat : Oui mais certains rois nègres ont néanmoins collaboré au trafic ?
JPO : Lorsque les Européens ont pris la décision de mettre un terme au trafic négrier, ont-ils organisé une réunion préalable avec les » rois » africains collaborateurs ? Je vous pose la question ?
AfricaMaat : Absolument pas ! Mais où voulez-vous en venir ?
JPO : Vous avez donc soit disant un vendeur et du jour au lendemain vous décidez de cesser toute relation commerciale sans même en discuter au préalable avec lui ? Vous le mettez devant le fait accompli ? C’est étonnant !
AfricaMaat : Cela cache quelque chose…
JPO : Cela montre qu’il s’agit d’une immense duperie, vous le voyez bien. Entre les » rois » artificiels, soutenus logistiquement par les occidentaux et les rois » en carton « , élus avec les ruses occidentales, c’est du pareil au même.
Leur colonne vertébrale, c’est la logistique occidentale et non pas le peuple africain. En fait, ce sont les
‘ otages royaux de l’occident ‘. Le paysage politique même de l’Afrique actuelle est apparu dès le 18ème siècle avec le cas du royaume Ndongo. Lors de l’élection du nouveau roi, les Portugais ont choisi leur candidat comme nous le révèle Béatrix Heintze :
» A la vérité, les résultats de ce vote, mis en scène par les Portugais, étaient déjà connu d’avance, mais (…) on tenait à tout prix à respecter les règles du jeu, du moins en apparence, afin de légitimer le nouveau roi aux yeux des Mbundu « . L’arme politique était déjà utilisée à cette époque par les Portugais pour affaiblir l’Afrique.
AfricaMaat : D’accord, d’accord, on reste bouche bée…
JPO : Le mot de la fin. Parlons maintenant de l’or qui a été volé. On parle du commerce négrier mais parallèlement les » princes marchands » avaient pour mission de piller l’or africain. L’or était d’ailleurs le deuxième marché après la traite. Mais cela, les historiens européens se gardent bien d’en parler…[page]
AfricaMaat : Merci beaucoup Mr Omotunde de toute ces précisions… On va vite se plonger dans la lecteur de votre 3ème ouvrage, ‘ la traite négrière européenne : vérité et mensonges ‘ avec impatience. Sous en entendu qu’il y a une vérité et de multiples mensonges…
JPO : C’est tout à fait cela. Je vous remercie. PS. Les sources des documents cités seront disponibles dans l’ouvrage.
( A lire : « La traite négrière européenne : vérité & mensonges » )