L’Afrique noire s’est particulièrement illustrée en matière de littérature, de philosophie, de réflexion sociale, spirituelle, de culture générale et d’enseignement universitaire avec ou sans influence étrangère.
Ce passage de l’historien Ibrahim Baba Kaké est l’un des vifs témoignages [1] :
» Les universités africaines étaient au Moyen Age des foyers d’une intense activité culturelle.
Les villes comme Oualata, Djenné et surtout Tombouctou, avaient déjà leurs universités.
L’université d’el Azhar au Caire, l’université Karaouine à Fès avec l’université de Tombouctou, formèrent le triangle culturel de l’Afrique (…)
Les ouvrages des écrivains et savants africains avaient été accueillis avec faveur dans tout le monde arabe. « [page]
Ces faits son peu connus et pourtant, dès 1856, Cherbonneau les confirmait dans son Essai sur la Littérature arabe au Soudan :
Manuscrits mauritaniens ( XVIIème siècle ).
» On remarque, (…) que l’enseignement donné à la jeunesse de ces contrées avait atteint le même niveau que celui des universités de Cordoue, de Tlemcen ou du Caire » (…)
Il se formait dans ces universités africaines de véritables lignées de lettrés dont Ahmed Baba était le modèle le plus représentatif.
» Ce savant dont la renommée déborda largement les limites de la Nigritie, avait saisi toute la subtilité de la pensée arabe de son temps (…) On lui attribue un nombre considérable d’ouvrages traitant du droit musulman, de la grammaire, de l’ethnologie, de la logique, etc… (…) Il y a une dizaine d’années, Mohammed Ibrahim al-Kettani a commencé l’inventaire des manuscrits de l’Occident africain dans les bibliothèques du Maroc, sa moisson s’est révélée très fructueuse » [2], poursuit Ibrahim B. Kaké.
Il est écrit à ce sujet :
» Il existe dans les bibliothèques du Maroc, une quantité d’ouvrages dus à la plume d’une quinzaine d’auteurs d’Afrique occidentale. Le total général de ces livres se situe autour de trois cents, près d’une centaine sont dus au seul Ahmed Baba « .
On peut donc affirmer que pendant les XIVème, XVème et XVIème siècles, la philosophie et les sciences s’épanouissaient au même degrés sur presque tout les points du continent africain « .[page]
Ahmed Baba ( 1526 – 1620 ).
A ce titre, il est pertinent de constater que certains récits émanant des explorateurs européens, complètent cette analyse, en nous apportant des faits et des anecdotes relatant des rencontres avec des princes, des rois ou des lettrés africains maîtrisant les cultures africaines, arabes et mêmes les sciences grecques.
Ainsi, au cours de l’expédition Denham-Clapperton-Oudney ( 1822-1824 ), le sultan Bello de Sokoto, fils successeur d’Othman Dan Fodio, remit à un explorateur anglais, la copie d’un passage de son livre écrit en arabe. Au cours d’un second voyage que ce dernier fit à la cour du Souverain africain en 1827, il a noté ce qui suit dans son carnet de voyage :
» Dimanche 29, J’ai vu le Sultan ; il était assis dans son appartement intérieur ; il avait devant lui la traduction arabe d’Euclide, dont je lui avait fait présent. Il me dit que sa famille avait possédé un Euclide, qu’un de leurs parents avait apporté de la Mecque ; mais que ce livre avait péri dans l’incendie qui, l’année dernière, avait détruit une partie de sa maison. Il ajouta qu’il était extrêmement obligé au Roi d’Angleterre de l’avoir gratifié d’un don si précieux « .[page]
Librairie Ahmed baba à Tombouctou.
Source :
[1] Cf. Ibrahima Baba Kaké, Combat pour l’histoire africaine, éd. Présence Africaine.
[2] Cf. Hesperis, 1967.