Bilal, premier muezzin de l’Islam, a-t-il été un esclave ?

Chaque fois qu’il est question du passé du peuple noir dans les livres religieux, c’est toujours pour en faire un peuple soumis, esclave et même maudit. Que cache de telles pratiques totalement
malhonnêtes ?

Bilal, l’appel à la priere – ( Illustration de Mehdi, couverture du livre de Mohamed B. Al-Hachem, Bilal, Muezzin Du Prophete d’Allah. )

Il est bien connu que l’esclavage subi par un peuple est toujours la conséquence d’un rapport de force qui lui est défavorable.

En s’appuyant sur des recherches fouillées, le romancier et essayiste malien Doumbi Fakoly nous offre un éclairage très pertinent à ce sujet, car effectivement, La puissance de l’Abyssinie rendait peu crédible la mise en esclavage de Bilal.

En effet, longtemps après la mort de Muhammad, Paix sur lui, la puissance politique de l’Abyssinie continuait encore de faire trembler tous ses voisins de la péninsule arabique.

Commentant la prédiction faite par un compagnon de Muhammad, et relative à la destruction de la Kaaba, J. Cuoq dit : « Cette sinistre prophétie indique indirectement la peur qu’inspiraient les Abyssins, soldats courageux et sans pitié, comme le rapportent maintes chroniques. Pour les Arabes du Hijâz, le mieux était de vivre en bons rapports avec eux. C’était sagesse »[page]

L’Arabie du sud, dont la population était noire, sédentaire et riche, employait les Arabes « comme mercenaires dans les troupes auxiliaires, chaque état avait ses Bédouins ». Or, depuis le 4ème siècle, les frontières de l’Abyssinie s’étendaient du Nil bleu à toute cette région.

L’influence exercée par la communauté noire de la Grande Abyssinie sur l’Arabie du Nord, était plus marquée encore sur le territoire de cette dernière. Les poids politique, économique et religieux de sa diaspora était considérable aussi bien à la Mekke qu’à Médine, lieux de naissance et maturation de l’Islam.

A la Mekke, et pendant plusieurs siècles, le contrôle de la vie politique et économique était entre les mains de la communauté noire des Khoza. Celle-ci ne fut supplantée par les Arabes Quorays que peu de temps avant le grand Hégire de 622.
C’est à dire onze ans après le début de la prédication et six ans avant la mort de Muhammad. Selon les historiens, toutes origines confondues, les premiers fidèles de Muhammad, ont pu échapper aux persécutions dont ils faisaient l’objet à la Mekke, grâce à la généreuse hospitalité de l’Abyssinie, destination du premier hégire en 615. Toujours d’après les mêmes historiens, c’est vers Médine que s’est dirigé, en toute confiance, le second et dernier hégire, en 622, au terme duquel l’Islam est devenu ce qu’il est aujourd’hui.

Or, il est établi que l’Abyssinie, comme Médine, était peuplée majoritairement de Noirs et dirigée par eux.

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Il est également intéressant de noter que la présence de mots d’origine abyssine dans le Coran n’est pas contestée.

Ya sin, titre de la Sourate 36, signifie entre autres ‘ Ô hommes ‘.

J. Cuoq nous dit que « certains auteurs sont même allés jusqu’à relever dans le Coran des mots d’origine éthiopienne ».
( Il site Noldeke, A.Jeffry et Hamidullah qui cite, à son tour, Suyûti, Brussa Bukhâri. )

Comme on peut aisément le constater, la configuration militaire, politique, économique et religieuse n’était pas de nature à permettre un esclavage quelconque à l’encontre du Nègre. Mais si on doit retenir comme crédible l’hypothèse selon laquelle l’esclavage, en général, a pu exister dans le Hijâz à l’époque qui nous intéresse, une interrogation majeure surgit alors des poubelles de l’histoire.

Par quelle malchance surréaliste Bilal, Paix sur lui, aurait-il été l’unique ou l’un des rares noirs privés de liberté ?

A l’évidence, l’esclavagisation posthume de Bilal cache quelques vérités dont la connaissance pourrait être hautement préjudiciable à quantités de certitudes établies. Il est clair comme l’eau de roche qu’elle relève d’une tentative de dévalorisation de la place que l’homme a occupée dans l’élaboration et l’épanouissement de la religion islamique.

En effet, n’est pas muezzin qui veut ! Seconde personnalité du sacerdoce musulman, le muezzin et toujours choisi pour sa grande connaissances du culte ; voilà pourquoi, il peut, à tout moment remplacer l’imam pour diriger la prière.

Si Bilal a réellement occupé cette fonction, surtout durant les premières années de l’islam, c’est, sans nul doute, parce qu’il était plus compétent que les autres compagnons et futurs successeurs de Mohamed. Les lois de Dieu sont peut être impénétrables, mais elle ne peuvent expliquer à elles seules par quel miracle un esclave peut t-il avoir acquis une telle instruction au dessus de la tête et des épaules de tels hommes libres et arabes et, de surcroît, déjà promus futurs Défenseurs des Croyants !
Seul les idées justes conduisent aux actions justes. Car Dieu, le tout puissant, représente la justice immuable l’amour véritable, la perfection absolue.

Puisque la foi dans les religions dites révélées, a pour fondement la vérité divine, il est incontestable que toute forme d’injustice ou de mensonge soit bel et bien d’origine humaine.[page]

Parmi les magnifiques attributs dont Dieu nous à fait bénéficier, celui dont il est question ici est le bon sens, celui la même qui nous oblige à reconnaître l’évidence.

Quelques citations du Coran :

Apportez vos preuves si vous dites la Vérité.
( Coran chap. 2, V.111 )

Ô vous qui croyez ! Si une personne injuste vous apporte quelque nouvelle, assurez-vous de son exactitude afin que vous ne fassiez tort à un peuple par ignorance et que par la suite vous n’ayez à regretter ce que vous avez fait.
( Coran chap.49,V6 )

A l’exemple de tant d’autres figures historiques du monde noir, Bilal mérite et doit être réhabilité.