AfricaMaat pour les nuls.

Quel est le but du site AfricaMaat.com ? ( Manuel d’aide pour les débutants en 15 leçons… )

I) – Qu’est-ce que les humanités classiques… ?

Le mot « Humanités Classiques » se compose du terme « Humanités » qui découle du latin « Studia Humanitatis », à savoir « Etude de l’Humanité ».

Par « Classiques » on désigne surtout la production intellectuelle la plus lointaine d’un peuple donné.

Ainsi, tout peuple possède ses propres « Humanités Classiques » qui contribuent à forger son identité et la vision de son destin. L’étude de ces Humanités englobe l’examen méthodologique de la production scientifique, technique, littéraire, philosophique et artistique des ancêtres les plus lointains d’un peuple donné, sans oublier le domaine des Sciences Sociales ( us et coutumes, spiritualité, cultures et traditions ).

II) – Pourquoi est-il important d’étudier les humanités classiques… ?

Le Ministère de l’Education Nationale, dans une circulaire datant de 2001 affirme qu’en contribuant « à l’acquisition de nouvelles compétences intellectuelles grâce à la diversité des exercices qui structurent leur enseignement », les « Humanités Classiques Européennes » visent à permettre aux jeunes générations de « se situer dans l’histoire et de comprendre les événements et idées d’aujourd’hui » tout en étudiant l’étymologie de leur langue maternelle.

Pour André Chervel et Marie-Madeleine Compère, « Les Humanités Classiques se présentent non seulement comme des  » études « , comme  » une instruction  » mais comme une  » éducation  » de l’individu, de l’esprit, de l’intelligence… ».

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Si vous ajouter qu’il s’agit du seul moyen de souder un peuple autour du même idéal de valeurs, vous avez dit l’essentiel.

III) – Pourquoi étudier le passé alors qu’il faudrait plutôt s’occuper du futur… ?

Notre présent découle d’un passé plus ou moins lointain, à savoir de choix réels ou d’absence de choix politiques, artistiques, linguistiques, philosophiques, technologiques, militaires, économiques, pédagogiques et idéologiques vécus par nos ainés et qui influeront inexorablement sur notre futur.

Leurs expériences, leurs combats contre l’impérialisme occidental ( victoires et défaites ), leur vision du monde, leurs réalisations artistiques, leur désir de souveraineté et leur génie intellectuel sont des éléments moteurs de la constitution de notre identité actuelle et de notre situation globale aujourd’hui dans le concert des nations.

« Le passé est la chair même du présent » disait le professeur Nicolas de Grimaldi.

En disant que la colonisation fut dans le fond « une négation systématique de l’autre, une décision forcenée de refuser à l’autre tout attribut d’humanité », Frantz Fanon souligne la nécessité pour nous, d’investiguer nous même notre passé afin de reconstruire notre humanité africaine et sortir de la spirale de l’aliénation/assimilation/désintégration.

Frantz Fanon.[page]

Tous les peuples souverains possèdent des dizaines de musées pour témoigner des réalisations de leurs ancêtres tandis que nous, nous avons encore un long chemin à parcourir dans ce domaine.

A cela, il convient de saisir que nos choix actuels conditionnent le futur économique et social des jeunes générations.

D’où l’importance de l’analyse de l’histoire pour ne pas commettre deux fois les mêmes erreurs et discerner les bons choix des mauvais.

IV) – Pourquoi vouloir absolument prouver que tout est d’origine africaine ?

Il existe 3 modèles historiques :

– Un Modèle Eurocentriste dit « Modèle Aryen » qui veut que la Grèce antique soit le berceau intellectuel de l’humanité.

– Un Modèle « Sémitico-centriste » qui sous-tend que l’Orient serait le berceau de l’humanité, de la spiritualité et des sciences.

– Enfin, un « Modèle Africain » dit « Modèle Ancien » qui lui s’appuie sur approche méthodologique stricte et surtout la science, pour affirmer l’origine négro-africaine de tout cela.

Comme l’a montré le professeur Martin Bernal, dans l’antiquité, nul peuple ne se hasardait à contredire le « Modèle Ancien ».

Par exemple, les premiers « afrocentristes » de l’histoire de l’humanité furent les Grecs.

Pour eux par exemple, l’origine africaine de l’humanité était déjà une certitude.

Mais depuis le XVIème siècle, en raison de l’impérialisme colonial de l’occident, on a vu germer des idées racistes sans fondement scientifique, que Jean François Champollion, le déchiffreur des hiéroglyphes, a personnellement condamné.[page]

Jean-François Champollion ( Collège de France, Paris )

Champollion a affirmé contre vent et marée que les arts en Grèce sont nés d’une « imitation
servile » des arts africains anciens.

Et il n’est pas le seul chercheur à l’avoir dit ouvertement.[page]

( Achille tue Penthésilée ).

Strabon n’a-t-il pas avoué que les Grecs ont ignoré la durée vraie de l’année et plein d’autres choses encore jusqu’à ce que des traductions en langue grecque des mémoires scientifiques des savants africains anciens, leur soient parvenues.

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Notre démarche vise donc essentiellement à démontrer qu’il est profondément arbitraire d’exclure systématiquement l’Afrique noire de l’historiographie universelle lorsqu’il est question des sciences
( mathématiques, géométrie, architecture, astronomie… ), des inventions ( écriture et technicité de l’écriture, navigation, médecine, agriculture… ), des réflexions humaines ( philosophie, spiritualité… ) et surtout, de la naissance de la civilisation ( Nubie, Egypte ).

V) – A quoi me sert-il de savoir que les égyptiens étaient des nègres dans ma vie de tous les jours… ?

Ce n’est pas tant la couleur de peau des égyptiens qui est la donnée primordiale, mais la culture.

Cette culture, de l’aveu de tous les spécialistes présents au colloque du Caire est négro-africaine.

A partir de là, cette information nous permet de bâtir nos Humanités Classiques Africaines, c’est-à-dire d’effectuer une rupture épistémologique avec l’occident, en faisant reposer notre corpus pédagogique sur notre propre patrimoine historico-culturel et non pas celui de l’Europe.[page]

Toute autre démarche relève d’un colonialisme à peine voilé. Est-ce que nous cherchons à imposer en Europe, les Humanités Classiques Africaines ? Non !

VI) – Qu’est-ce que l’afrocentricité… ?

L’afrocentricité est une philosophie initiée par le professeur Molefi Kete Asante de l’université de Temple aux USA qui vise à nous poser continuellement la question de l’intérêt de l’Afrique et des peuples africains du continent et de la diaspora dans les choix de vie que nous effectuons tous les jours.

Le professeur Molefi Kete Asante.

( Temple university ).[page]

Au delà, l’Afrocentricité, n’est pas le contraire de l’eurocentrisme dogmatique qui ne dote du label de l’Universalité, comme le rappelait Aimé Césaire, que les expériences humaines européennes pour finalement les ériger en Modèle Universel de toute l’humanité (sic).

Aimé Césaire ( 1959 ).

L’objectif est de montrer qu’il existe un point de vue africain rationnel différent du point de vue européen et même qu’il existe une multiplicité de points de vue ( asiatique, indien… ) qui doivent être pris en considération.

VII) – Pourquoi parle-t-on de thèses  » afrocentristes…  » ?

Les thèses  » afrocentristes  » n’existent pas.[page]

La notion de « thèses afrocentristes » est une invention de l’occident pour faire diversion et éviter que les profanes ne se hasardent à lire nos thèses historiques et ne leur accordent un crédit intellectuel.

Tout comme le terme « afrocentrisme » dans lequel nous ne nous reconnaissons pas, c’est une attaque psychologique de bas étages, qui joue sur les mots et leur connotation péjorative pour défendre les spéculations sans fondement scientifique du « Modèle Aryen ».

Notre démarche est sérieuse. Elle vise à promouvoir nos Humanités Classiques Africaines et à démontrer que la marginalisation historique de l’Afrique du cours de l’histoire intellectuelle de l’humanité repose sur une approche racialiste découlant de la période coloniale.

De plus, les matériaux historiques que nous utilisons sont universels.

VIII) – L’afrocentricité n’est-elle pas une forme de repli sur soi, et de haine des autres… ?

De la même façon que l’on a fait le procès de la négritude de Césaire en l’accusant de n’être qu’un repli sur soi, on ressort le même refrain à propos de l’afrocentricité.

La négritude est la démarche des opprimés résultant de l’impérialisme occidental qui veulent malgré tout, préserver leur identité propre contre l’assimilation forcée.[page]

Universellement, l’assimilation est d’ailleurs reconnue comme un viol de la personnalité d’autrui.

L’afrocentricité, en plaçant l’Afrique comme point de départ de l’histoire et des idées, étudie l’évolution de l’humanité à travers le monde, à partir de son bagage africain.

Elle est donc d’essence universaliste puisque l’homo sapiens a quitté le continent pour aller découvrir le monde.

Dans le fond, cette accusation sans fondement, vise simplement à combattre les Africains conscients qui défendent leurs intérêts matériels et moraux.

Cette démarche salutaire prend à contre pied la notion de mondialisation qui est le nouveau cheval de Troie hégémonique de l’Occident.

IX) – Pourquoi les afrocentristes sont-il des racistes anti-blancs… ?

Il ne faut pas confondre débat scientifique et querelles épidermiques.

En ce qui nous concerne, seuls les débats scientifiques nous intéressent.

Cette accusation qui dévoile la fourberie de leurs auteurs, est née lorsque les chercheurs occidentaux ont pris conscience qu’ils étaient totalement incapables de soutenir scientifiquement la thèse de la non-origine africaine des Égyptiens anciens sans recourir aux escroqueries de toutes sortes.

Voilà le fond du problème.

La seule concession qu’ils étaient prêts à faire, après avoir essuyé maintes défaites, c’est la valorisation d’une nouvelle thèse multiraciale, ce que nous avons refusé car aucun témoin visuel Grec ou autre, n’en a parlé.

Aristote ( – 384 à – 322 ) a mentionné à son époque encore, que les Égyptiens et les Éthiopiens étaient
« agan melanes », c’est-à-dire, « excessivement noirs ».[page]

C’est à partir de là que les accusations de racismes ont vu le jour. Le professeur Cheikh Anta Diop, qui était pourtant chargé de mission par l’U.N.E.S.C.O. sur des questions portant sur la lutte contre le racisme dans le domaine scientifique, s’est aussi fait traité de chercheur raciste.

Il ne reste donc à l’Occident que la gloire de la fourberie pour défendre son point de vue.[page]

X) – Pourquoi parle-t-on des inventeurs noirs… ?

Il est important d’ouvrir un nouveau champ imaginaire dans l’esprit des jeunes générations. La découverte des savants noirs, de leurs inventions et de leurs implications dans la vie de tous les jours est en cela importante.

Pour se motiver et réaliser de grands rêves, tout jeune a besoin d’un modèle exemplaire. C’est donc aux adultes de leur choisir des modèles valorisant plutôt que de laisser les médias leur proposer des individus sans consistance, de simples panneaux publicitaires ou encore des gangsters jouant continuellement aux gendarmes et aux voleurs. Quand on aime un enfant, on ne lui donne pas du pain empoisonné.

Cette situation fait d’ailleurs le bonheur de l’industrie occidentale des armes, comme on le voit par exemple aux USA. Tout changement induirait pour eux, une baisse de leur chiffre d’affaires annuel sur la vente des armes et surtout des munitions.

XI) – Pourquoi tous ces discours qui ne résolvent pas dans le fond les problèmes actuels des Noirs… ?

Aucun homme ne peut réaliser ce qu’il n’a pas clairement visualisé.

Donc, il est utile de dialoguer afin d’accorder nos violons.[page]

Et puis les discours lèvent le voile sur la désunion ambiante afin de faire germer l’Unité salutaire.

Il n’y a rien d’exceptionnel dans cela car toute l’histoire de l’impérialisme occidental repose sur cet adage : « diviser pour mieux régner ».

Cependant, il convient d’admettre que c’était normalement à l’élite et aux politiques que revenait la mission de se donner les moyens de la défense de nos intérêts matériels et moraux.
Or, c’est justement cette élite alimentée et bridée par l’Occident, qui se fourvoie en bradant nos intérêts collectifs pour des intérêts individuels.

A partir de là, nous devons prendre des décisions conservatoires pour défendre nous-mêmes nos intérêts. Hors de la lutte, il n’y aura pas de progrès de toute façon.

XII) – Qu’est-ce que la Renaissance Africaine… ?

La Renaissance Africaine est un concept philosophique initié par le professeur Cheikh Anta Diop visant la reconquête intellectuelle, artistiques, culturelle, politique et économique de l’Afrique par les Africains. Pour y parvenir, nous devons faire germer une nouvelle « espèce » d’hommes et de femmes africains, capable d’opérer la rupture épistémologique avec l’occident et enfin de pourvoir souverainement au destin du continent.

Cette Renaissance qui s’appuie sur la valorisation des Humanités Classiques Africaines, doit revêtir de nombreuses formes et facettes qui doivent converger vers les buts suivants : l’Unité et la collaboration africaine dans tous les domaines ( économie, finance, enseignement… ), la défense du continent et la souveraineté totale !

XIII) – Pourquoi parle-t-on d’aliénation culturelle… ?

Après avoir scellé sa domination sur les pays du sud par les armes, l’Europe a eu recours à l’idéologie coloniale déclinée dans l’enseignement scolaire, le catéchisme, la vie sociale et les média pour maintenir un climat de domination mentale.

Comme le rappelle l’africain caribéen Dominique Matuka :

« Tout ne commença pas par la couleur, non, mais par la force.
Le comportement d’asservissement obtenu des nègres et des négresses par les esclavagistes dans la société esclavagiste a été rendu possible, pendant tous ces siècles, parce que ces derniers opposèrent à la volonté de liberté des premiers une oppression militaire.[page]

Nous ne cesserons de le rappeler.

C’est cette oppression qui a permis la réalisation du système et c’est aussi elle qui imposera à des hommes et des femmes de rester à cette place d’esclave définie délibérément par les oppresseurs.

Nous voulons dire que les esclaves perçoivent sans aucune ambiguïté l’objet de leur crainte, leur conscience ne puise en rien dans l’imaginaire mais bien dans la réalité désastreuse que leur font vivre leurs oppresseurs.

Les coups de fouet qui lacèrent leur corps sont bien réels, le travail forcé constitue exactement leur quotidien, les amputations multiples de leurs mains et de leurs jambes perpétrées par les esclavagistes sont des évènements qu’ils vivent.

Ils sont torturés. Des preuves ? Il en existe des milliers ».

Avec une grande lucidité, l’académicien Levi Strauss a reconnu que si les peuples du sud avaient sombré à un moment dans l’aliénation, c’est-à-dire, le dénigrement de leur identité originelle, ce ne fut cependant pas le fruit de leur volonté délibérée.

Claude Lévi-Strauss ( 1908 – 2009 ).[page]

Cette décision fut induite par la force [1] :

« Loin de rester enfermées en elles-mêmes, les civilisations reconnaissent, l’une après l’autre, la supériorité de l’une d’entre elles, qui est la civilisation occidentale (…) L’existence d’une civilisation mondiale est un fait probablement unique dans l’histoire (…) On commencera par remarquer que cette adhésion au genre de vie occidental, ou certains de ses aspects, est loin d’être aussi spontanée que les occidentaux aimeraient le croire.

Elle résulte moins d’une décision libre que d’une absence de choix.

La civilisation occidentale a établi ses soldats, ses comptoirs, ses plantations et ses missionnaires dans le monde entier ; elle est directement ou indirectement, intervenue dans la vie des populations de couleur ; elle a bouleversé de fond en comble leur mode traditionnel d’existence, soit en imposant le sien, soit en instaurant des conditions qui engendreraient l’effondrement des cadres existants sans les remplacer par une autre chose.

Les peuples subjugués ou désorganisés ne pouvaient qu’accepter les solutions de remplacement qu’on leur offrait (…) En l’absence de cette inégalité dans le rapport des forces, les sociétés ne se livrent pas avec une telle facilité (…) Si ce n’est pas le consentement qui fonde la supériorité occidentale n’est ce pas alors cette plus grande énergie dont elle dispose et qui lui a précisément permis de forcer le consentement ? Nous atteignons ici le roc ».

Le combat contre l’aliénation culturelle est donc le combat de l’Africain conscient contre les démons de l’impérialisme occidental qui veulent l’entrainer à détruire continuellement son essence originelle pour sacrifier sur l’autel de son aliénation/assimilation, le sang de ses ancêtres nègres, qui coule dans ses veines !

XIV) – Qu’est-ce que j’y gagne à connaitre mon histoire… ?

Voir question 3 !!!

XV) – Finalement, plutôt que d’écrire des livres, qu’est-ce que vous attendez pour passer à l’action… ?

Écrire des ouvrages pour éclairer les esprits, animer le site AfricaMaat, organiser les cours de l’Institut AfricaMaat, animer des expositions sur les inventions du monde noir, faire les conférences, rencontrer les jeunes dans les associations ou les écoles, animer des émissions à la télé ou à la radio, c’est déjà cela passer à l’action.[page]

Nous avons choisi d’œuvrer ardemment pour vulgariser le savoir et le mettre à la portée de tous. Et nous avons encore du pain sur la planche.

Références bibliographiques :

[1] Levi Strauss, Race et Histoire.