La traite négrière reste un sujet d’actualité car ses effets subsistent encore. Cependant, beaucoup de gens avancent toutes sortes d’idées sur le sujet en disant un peu vite que se sont des nègres qui ont vendu des nègres aux négriers. C’est de là que vous avez eu l’idée de cet ouvrage ?
Jean-Philippe Omotunde :
Oui, au début je voulais publier sur le site un article sur le sujet. J’ai donc fait des recherches et j’ai très vite j’ai dépassé les 50 pages. Ce n’était donc plus possible de publier le document sur le site, d’où mon ouvrage ‘ La traite négrière européenne : vérité & mensonges. ‘
Sylvia B. :
C’est un sujet qui nous intéresse tous, peu importe où nous sommes dans le monde car il est à l’origine de nos malheurs actuels. Tous les ouvrages occidentaux disent que les Africains sont responsables de leur malheur car ils se sont vendus aux négriers. Beaucoup de noirs aux USA, au Brésil et dans la Caraïbe en sont d’ailleurs convaincus car on leur enseigne cela dans les écoles, d’où leur rejet actuel de l’Afrique.
JPO :
Le tableau que vous avez dressé de la situation est exact. Je suis moi-même descendant d’esclave africain déporté en Guadeloupe pour cultiver la canne à sucre et cette version de l’histoire je la connais par cœur. Bon mais maintenant, il faut réfléchir et tâcher de comprendre les réalités historiques de l’époque.
Sylvia B. :
Moi, il y a des choses que j’aimerais enfin comprendre ?
JPO :
L’esclavage est un sujet sur lequel il y a eu plus de mensonges que de vérités distillés dans les manuels ou les média. Il nous faut donc réexaminer chacune des informations.
Sylvia B. :
Commençons par le rôle de l’Eglise dans l’affaire. L’Eglise a t-elle été à la hauteur de sa mission et de[page]
son message ?
JPO :
Si on tient compte du fait que le rôle de l’Eglise est de préparer la venue du royaume de Dieu et qu’au royaume de Dieu il n’y a ni maître ni esclave, l’Eglise s’est fourvoyée car elle défend et justifie l’esclavage dans la Bible !
Voyons cela.. Dans les textes de l’Ancien comme ceux du Nouveau Testament leurs auteurs soit-disant inspirés, reconnaissent et acceptent l’esclavage. Ils cherchent seulement à tenter de l’humaniser.
St Paul demande par exemple aux esclaves d’obéir à leur maître » avec crainte et tremblement « . » Nous avons tous, en effet, été baptisé dans un seul corps, soit juifs, soit grecs, soit esclaves, soit libres et nous avons tous étés abreuvés d’un seul Esprit » dit le passage de Corinthiens 12,v 13 mais dans épître aux Galates, la Bible se contredit en lançant :
» Il n’y a ni hommes, ni femmes, ni Juifs, ni Grecs, ni hommes libres, ni esclaves, vous êtes tous un en Jésus Christ « .
Jésus Christ est à toutes les sauces, tantôt esclavagiste, tantôt abolitionniste. Vous voyez !
Sylvia B. :
C’est assez surprenant dit comme cela !
JPO :
Deuxièmement, l’Eglise a non seulement possédé des esclaves mais aussi expulsé les Noirs de ses locaux à l’époque de la ségrégation aux USA ou durant l’Apartheid en Afrique du Sud, ne l’oublions pas ! Aux Antilles, c’est le fouet qui donnait le signal de la prière aux esclaves sur les plantations, vous pensez que c’est sérieux ?
Martin Luther King comptait même parmi ses plus durs adversaires, des hommes d’église qui voyaient d’un très mauvais œil son combat pour les droits civiques.
Sylvia B. :
Toutes ces choses ne sont généralement jamais abordées par les média. Il y a une certaine conspiration du silence en occident sur tout cela ![page]
JPO :
Je n’ai pas fini. Troisièmement, la Bulle pontificale d’appel soit disant à la » guerre sainte » contre les païens nègres, datant du 8 janvier 1454 et rédigée par le Pape Nicolas V ( de son vrai nom Tomaso Parentucelli ) dont voilà un extrait, invite clairement le roi Alphonse V du Portugal à décimer l’Afrique, à mettre en esclavage les Nègres et à les déporter, manu militari :
» Nous avions jadis, par de précédentes lettres, concédé au Roi Alphone, entre autres choses, la faculté pleine et entière d’attaquer, de conquérir, de vaincre, de réduire et de soumettre tous les sarrasins
( nègres ), païens et autres ennemis du Christ où qu’ils soient, avec leurs royaumes, duchés, principautés, domaines, propriétés, meubles et immeubles, tous les biens par eux détenus et possédés, de réduire leurs personnes en servitude perpétuelle (…) de s’attribuer et faire servir à usage et utilité ces dits royaumes, duchés, contrés, principautés, propriétés, possessions et biens de ces infidèles sarrasins ( nègres ) et païens (…) Beaucoup de Guinéens et d’autres Noirs qui avaient été capturés, certains aussi échangés contre des marchandises non prohibées ou achetés sous quelque autre contrat de vente régulier, furent envoyé dans lesdits Royaumes ( Amérique, Antilles… ) « , ( Cf. Le péché du Pape contre l’Afrique, Assani Fassassi, éd. Al qaram. ).
Le texte est suffisamment clair. Bon, maintenant quant aux évêques africains qui demandent pardon aujourd’hui pour la traite, il faudrait qu’ils nous donnent au préalable de toute discussion, le nom des évêques africains qui existaient à l’époque de la traite ?
Moi, je n’en connais pas donc je ne discute pas avec eux !
Sylvia B. :
l’historiographie occidentale dit qu’il fallait évangéliser les Noirs, d’où le fait de les déporter en Amérique ?
JPO :
C’est une autre escroquerie cette affaire. Déjà Dieu est né en Afrique de l’aveu des anciens ( Grecs, Egyptiens, etc… ) C’est toujours l’Ethiopie qui est désignée par les historiens anciens, comme étant le pays d’origine des pratiques religieuses. D’autre part, de l’aveu même de l’abbé de Castelli, alors préfet de la Martinique en 1844 qui dresse un constat cinglant 4 ans avant l’abolition définitive de l’esclavage en 1848, il n’y a jamais eu d’enseignement religieux destiné aux esclaves.[page]
Voilà d’ailleurs ce qu’il écrit lui-même :
» Le mouvement de la propagation religieuse est nul ou presque nul, en comparaison de ce qu’il devrait être dans la situation actuelle « .
Et pour la Guadeloupe, il poursuit :
» Osons le dire, l’instruction religieuse et morale des esclaves, si fortement recommandée par les ordonnances royales et les prescriptions ministérielles, si impérieusement prescrite surtout par les divins préceptes de l’évangile, est nulle à la Guadeloupe «
( Cf. M. L’abbé de Castelli, ‘ De l’esclavage en général et de l’émancipation des Noirs. ‘ Les mots en lettres capitales, le sont dans le texte original ).
Les faits sont là !
Sylvia B. :
Bon, dites-nous Mr Omotunde, est-il vrai que les historiens blancs qui sont des donneurs de leçon à la mémoire courte, passent sous silence l’époque où l’Europe vendait des esclaves blancs aux Arabes ?
JPO :
Toute l’histoire de l’Europe est jalonnée de ce type de fait car les sociétés indo-européennes issues du nomadisme ont été pour la plupart esclavagistes ( Grèce, Rome… ).
Durant le Moyen Age à l’époque carolingienne par exemple, des chrétiens vont combattre sans relâche, des peuples européens de langue slave installés dans la majeure partie de l’Europe centrale et orientale, qu’ils traitent de païens. Les rois saxons Henri l’Oiseleur et Otton Ier vont par exemple dès le Xème siècle en faire leur » sport » favori. Les captifs Slaves vont alors alimenter massivement un commerce esclavagiste prolifique entre Venise et l’empire Arabe au sud de la Méditerranéenne.
Les commerçants vénitiens, pourtant chrétiens, ne voient absolument aucune objection à ce trafic d’esclaves blancs. Ils vendent sans état d’âmes de futurs esclaves Slaves aux marchands Arabes. Le
» Quai des esclaves « , de son vrai nom, la Riva Degli Schiavoni, à Venise est d’ailleurs l’un des vestiges de cette période. C’est donc à ce moment que le mot latin » Slavus » désignant les Slaves, va être progressivement remplacé par le mot » Sclavus » d’où le mot » Esclave » pour désigner des captifs blancs privés de liberté et considérés comme des » biens meubles « .[page]
Selon l’historien Jacques Heers, les Bulgares même n’échappaient pas non plus aux trafics d’esclaves blancs ( Cf. Jacques Heers, ‘ Esclaves domestiques au Moyen Age dans le monde méditerranéen ‘, Paris, Hachette, 1981 ) :
» Condamnés ou pourchassés par l’Eglise d’Orient elle-même, capturés, vendus aux italiens, les Bulgares apparaissent nombreux sur les marchés d’Occident ( y formant ) une part non négligeable de la population servile dans les années 1200 et 1300 « .
Donc vous voyez, à l’époque les Européens vendaient des esclaves blancs aux Arabes en passant par Venise d’où l’origine même du mot » esclave » qui désigne dans son sens premier, des blancs mis en captivité. Enfin, avant de déporter des Nègres sur les plantions, les Européens ont d’abord déporté des milliers blancs qui portent par euphémisme, le nom d’engagés.
Sylvia B. :
Merci de toutes ces précisions. je poursuis mon investigation avec vous. Est-il vrai que l’Afrique était peuplée que de sauvages à l’époque précoloniale ?
JPO :
Dans la réalité, il n’y avait pas plus de sauvages en Afrique qu’il y en avait en Europe au même moment. Que dit par exemple l’ethnologue allemand Léo Frobénius ( 1873-1938 ), qui a entrepris près d’une douzaine d’expéditions en Afrique noire :
» Lorsqu’ils ( les navigateurs européens ) arrivèrent dans la baie de Guinée et abordèrent à Vaïda, les capitaines furent fort étonnés de trouver des rues bien aménagées bordées sur une longueur de plusieurs lieues par deux rangées d’arbres : ils traversèrent pendant de longs jours une campagne couverte de champs magnifiques, habités par des hommes vêtus de costumes éclatants dont ils avaient tissé l’étoffe eux-mêmes ! Plus au sud, dans le Royaume du Congo, une foule grouillante habillée de soie et de velours, de grands Etats bien ordonnés et cela dans les moindres détails, des souverains puissants, des industries opulentes. Civilisés jusqu’à la moelle des os ! Et toute semblable était la condition des pays à la côte orientale, la Mozambique, par exemple « .
( Cf. ‘ Histoire de la civilisation africaine ‘ ; Léo Frobénius, traduit par Back et Ermont, Gallimard, Paris 1938 )
Et ce n’est pas le seul témoignage occidental.[page]
Sylvia B. :
Comment les historiens européens perçoivent-ils la traite ?
JPO :
Sylvie Brunel de l’université Paul Valéry à Montpellier affirme que :
» Beaucoup d’africains ont tiré parti du commerce de leurs semblables (…) le continent noir incarne aujourd’hui toute la misère du monde (…) Qu’il faille coopérer avec l’Afrique l’aider à sortir de la pauvreté et du sous-développement ne doit pas pour autant s’exercer au nom d’une prétendue ‘ réparation ‘ d’un passé pour le moins trouble «
( Cf. Revue, L’histoire n° 280 S, P. 79 ).
Olivier Pétré-Grenouilleau professeur à l’université de Bretagne-sud raconte que :
» C’est parce que la traite était profitable, dans le contexte africain, que des négriers noirs offrirent à leurs homologues occidentaux et orientaux, les captifs que ceux-là ne souhaitent ni ne pouvaient forcer les marchands africains à leur vendre (…) Cet infâme trafic n’aurait pu être mis en place s’il n’avait rencontré l’intérêt de négriers africains disposant d’une réserve d’esclaves, fruit de guerres inter-africaines incessantes à certaines époques «
( Cf. La Documentation Française, Les traites négrières, Olivier Pétré-Grenouilleau ).
Liliane Crété auteur de » La traite des nègres sous l’ancien régime » ( éd. Perrin ), ajoute qu’ :
» Il faut reconnaître que les Africains furent en partie responsable de leurs malheurs « .
Bref, inutile de tous les passer en revue, tous les textes sont du même acabit.
Sylvia B. :
Oui mais certains responsables africains disent qu’ils ont autrefois vendu des Nègres ?
JPO :
Que ceux qui disent cela nous sortent leurs contrats de vente ! Sans contrat de vente on ne discute pas ! Quand on dit que les Européens ont vendu des esclaves noirs, les documents sont là. D’ailleurs sans document authentique, aucun européen ne nous prendrait au sérieux n’est ce pas ? Bon ![page]
Sylvia B. :
Y avait-il déjà des esclaves en Afrique ?
JPO :
Ce thème est l’un des arguments principaux des Européens mais il est fallacieux, comme tous leurs arguments. Si l’esclave se défini comme un » bien meuble » ( Code Noir ), un » objet animé » ( Aristote ), un » être maudit » ( malédiction de Cham, Bible, Génèse ), un » instrument de production » ( Ernest Renan ), une » bête de somme » ou un » objet de distraction » ( Rome ), il convient d’admettre une bonne fois pour toute, que ce type d’individu était inexistant en Afrique noire précoloniale !
L’Afrique a pratiqué le servage mais l’esclavage non ! C’est incompatible avec son berceau idéologique, l’Egypte ancienne, où l’esclavage n’existait pas, n’en déplaise à Mr Pierre Grandet ( Cf. L’histoire n°280 S ) qui va même jusqu’à dire que le » silence des sources (…) ne permet pas de supposer que l’esclavage ait été ignoré en Egypte « . Même lorsque l’on n’a rien, il faut quant même affirmer. Vous imaginez si nous nous abaissions à de telle conclusion sans disposer d’aucune preuve à propos de l’histoire de
l’Europe ?
Sylvia B. :
Voyons le dossier le plus sensible, celui de la soi-disante responsabilité africaine ?
JPO :
J’y viens mais d’abord quelques préalables. Sur tous les continents, l’histoire de l’humanité a connu les mêmes étapes. Des individus ont tout d’abord formé les premiers clans puis ces clans se sont affrontés plus ou moins violemment. Chaque victoire permettait au clan vainqueur de s’agrandir.
Ce phénomène fit que les clans devinrent des principautés qui s’affrontèrent pour finalement donner naissance à des royaumes. Puis les royaumes se sont affrontés pour donner naissance à l’Etat. Telle est l’histoire de France par exemple. Donc parler de luttes intestines africaines sans donner l’explication de ces luttes est une preuve d’incompétence de l’auteur, il faut le savoir ! Ainsi, avec un minimum d’honnêteté, Serge Daget avoue :
» Rappelons encore une fois, les remarques faites à leurs époques par deux souverains africains au sujet de leurs guerres. Le roi du Dan-Homey ( le Dahomey, actuel Bénin et plus exactement Abomey[page]
capitale du royaume ) comme le roi des Asantes disaient l’un et l’autre que l’objectif de leurs combats militaires n’était pas de remplir les navires négriers de captifs à déporter. Leurs guerres étaient politiques. Dans le cas du Dahomey par exemple, la politique essentielle consistait à se libérer de la tutelle et des tributs économiques que, peut être antérieurement à sa propre constitution politique bien datée au milieu du XVIIème siècle, le royaume versait déjà à l’empire Yoruba d’Oyo. Dans le cas du royaume Asante ( on dit Achanti en français ), la politique essentielle consistait à réduire puis détruire la puissance des royaumes et empires environnants, Denkyira, Akwapin, Akwamu, Gonja, afin d’assurer sa prépondérance, la transcender par la création d’un empire, puis de maintenir celui-ci « .
( Cf. ‘ La traite des Noirs ‘, éd. Ouest-France Université )
Donc, avant l’arrivée des blancs, le processus historique universel de la formation des vrais états africains était en marche. Il est donc faux de dire que les luttes avaient pour but l’approvisionnement de la traite !
Sylvia B. :
Que va-t-il alors se passer avec l’arrivée des blancs ?
JPO :
Il faut savoir que l’arrivée des blancs en l’Amérique, l’extermination des Indiens et l’incapacité des blancs à cultiver les terres de leurs nouveaux territoires ont conduit leurs rois à prendre unilatéralement la décision d’aller capturer des Nègres en Afrique pour faire le boulot à leur place. Donc, cette décision a été prise par les rois européens et le Vatican seuls !
Ce qui s’est passé après ne nous concerne déjà plus, puisque la décision avait déjà été prise de toute façon. D’ailleurs aucun indien ne discute encore pour savoir qui a vendu qui, compte tenu du fait qu’ils y sont presque tous restés. Donc ayant acquis par le génocide généralisé des Indiens de nouvelles terres en Amérique, les Européens ont changé de stratégie. Cela aurait pu être aussi le contraire, à savoir génocide des Nègres et déportation massive des Indiens en Afrique.
On voit bien ici que tout cela relève de la cuisine exclusivement européenne. Bon, mais on constate que certains historiens qui salissent les Nègres au début, connaissent bien la vérité. C’est une stratégie bien connue en communication.
Mme Crété avoue par exemple que :
» Pour se défendre ou reconquérir leur liberté, les peuples assujettis ou en voie de l’être, devaient[page]
acquérir des fusils et de la poudre. L’Afrique de l’Ouest fut entraînée dans une course aux armements qui aboutit à un accroissement du trafic des esclaves. Les Africains étaient pris dans un engrenage infernal : pour obtenir des fusils, il fallait des esclaves ; pour se procurer des esclaves, il fallait des fusils. Au XVIII siècle, les guerres tribales mirent la région à feu et à sang « .
Comment faut-il comprendre cela ? A l’époque, nos ancêtres avaient enclenché le processus qui devaient aboutir à la formation des Etats africains. Là-dessus, arrivent les Européens qui proposent des armes aux royaumes fraîchement assujettis en leur proposant en échange de captifs provenant du camp adverse, une aide logistique essentiellement en armes à feux et autre poudre à canon. Le royaume déjà vainqueur est mis à mal par les anciens vaincus, équipés cette fois en armes de destruction massive d’origine européenne. Constatant alors sa défaite annoncée, l’ancien roi vainqueur va voir les Européens pour clarifier la situation.
Le rapport de force est en sa défaveur et les choix qui lui restent sont minces. Soit il accepte sa défaite et la déportation de tout son royaume, soit il se défend… avec des armes européennes pour rétablir le rapport de force.
Contraint et forcé, il accepte et voilà maintenant qu’en échange d’armes à feu, les deux camps livrent des captifs aux européens qui tirent toutes les ficelles. Notons enfin, qu’à l’époque la notions de » frère » dans la communauté noire, n’existait pas ! Elle est une résultante de l’esclavage et de la colonisation.
Sylvia B. :
Transposons tout cela à l’Europe pour mieux comprendre.
JPO :
Ok, imaginez que nous sommes à l’époque de la conquête de la Gaule par les romains.
Vercingétorix sait que sa défaite est annoncée tandis que les romains chantent déjà victoire. Arrivent alors les guerriers du Dahomey avec des mitraillettes qui disent à Vercingétorix :
» Aide nous a détruire l’empire romain, en échange on te donne des mitraillettes et tes captifs romains tu nous les remets. On va les expédier en Afrique pour cultiver l’igname « .
Il n’y a pas une seule chance pour que Vercingétorix disent non, on est d’accord ![page]
Bon, 2 semaines après la bataille, les Dahoméens vont voir Jules César et lui disent :
» Bon, tu vois que tu vas perdre ton royaume, c’est évident ! Si tu veux sauver les tiens, on te fait une proposition. On te livre nos mitraillettes et en échange, tu nous livres tes captifs gaulois « .
Pensez-vous que César dira non ? Impossible ! Résultat, les Dahoméens gagnent sur les deux tableaux car ils ont mis en place un rapport de force de part leur équipement militaire plus sophistiqué que les Européens.
Résultat : L’Europe est à feu et à sang à cause des Dahoméens qui y introduisent toutes sortes d’armes à feu.
Imaginez la suite maintenant, Vercingétorix a gagné. Mais les Dahoméens veulent toujours des captifs, n’est ce pas ? Ne vont-ils pas alors lui suggérer de livrer de nouvelles guerres à d’autres royaumes européens pour faire de nouveaux captifs ? Bon, vous avez compris maintenant !
Sylvia B. :
Vous voulez dire que toute l’histoire de l’esclavage repose sur ce principe ?
JPO :
Même Mme Crété le confirme : » La prolifération des armes à feu facilita l’incorporation forcée des petits Etats dans les grands. L’expansion territoriale par la force devint le moyen par excellence d’accaparer le pouvoir économique de l’ordre nouveau « .
Pour se rendre compte de l’importance de ce phénomène, il vous suffit d’analyser la courbe exponentielle de la production d’armes à feu en Europe à cette époque. Pour le Golfe du Bénin par exemple, J. B. Inikori avance le chiffre de 283 000 armes à feux introduites entre 1750 et 1807.
Selon Richardson, c’est près de 180 000 fusils qui furent introduits par an durant les années 1730 sur la côte des esclaves. Pour beaucoup, ces estimations sont encore en dessous de la vérité. Mais je voudrais encore vous donner cet autre exemple. M. Poncet alors Gouverneur de Gorée en mai 1764, a averti le ministre des Colonies français de ses intentions qui visaient à entraîner le Damel Madior et le Buurba Dyolof, deux royaumes africains, dans une guerre intestinale farouche, afin d’affaiblir les deux souverains pour qu’ils ne soient pas en mesure de s’opposer à la pénétration française
( Cf. Becker ( Charles ) et Martin ( Victor ), Kayor et Baol ‘ royaumes sénégalais et traite des esclaves au XVIIIème siècle ‘, Revue française d’histoire d’outre-mer, tome LXII, 1975 ).[page]
Que dit alors M. Poncet, je vous laisse apprécier :
» Kayor appartient à Damel dont je suis sûr, nous sommes entièrement liés d’intérêts… Pour celui d’Yoloff dont le roy se nomme Bourba-Yolof, je ne sçai s’il me fera quelques difficultés, mais s’il ne veut pas s’arranger avec moy, je luy ferai faire la guerre par Damel. Les Roys de Cayore et de Yoloff sont ennemis dès l’instant qu’ils sont Roys, Bourbayoloff ayant intérêt de l’affoiblir. Je leur ferai assez bien sentir leur intérêt et je donnerai à Damel des Présents de poudre et de balles afin de l’engager à attaquer Bourbayoloff, je pourrois même lui fournir un détachement et du canon de campagne « .
Vous voyez le subterfuge ?
Sylvia B. :
Je dois reconnaître que votre analyse m’ouvre considérablement les yeux sur cette page d’histoire. Je comprends mieux tout cette entreprise de falsification autour de la traite.
JPO :
Naturellement dans mon ouvrage, je donne encore plus de détails. Je reste convaincu que cette affaire a été montée de toute pièce par les Européens pour arracher des captifs à l’Afrique. Aujourd’hui, les historiens occidentaux sont tous amnésiques car la question des réparations les inquiètent. Mais qu’ils sachent qu’il va falloir dédommager l’Afrique et les descendants des esclaves. On ne lâchera pas l’affaire ! Car bien mal acquis… vous connaissez la suite.
Ceci dit, jusqu’à aujourd’hui, c’est la même stratégie qui est utilisée pour affaiblir des populations dans certaines régions du globe.
Sylvia B. :
Un dernier mot pour nos internautes ?
JPO :
On pourrait dire de la même façon que les Noirs détruisent les Noirs aujourd’hui dans les ghettos américains en vendant de la drogue aux leurs. Mais cela serait simpliste car la drogue ne pousse pas dans le ghetto. Elle ne pousse pas non plus aux USA.[page]
Donc les véritables questions sont, pourquoi les Noirs en sont réduits à cela ?
Qui fait pression sur eux au point de les acculer à cela ?
Qui achemine la drogue aux USA puis dans le ghetto ?
Qui tire profit de ce trafic ?
Où va l’argent ?
Que font les services chargés de veiller à la sécurité des citoyens ?
Pourquoi y-a-t-il plus d’armes à feux dans les ghettos noirs que dans n’importe quel autre endroit aux USA ? Qui achemine les armes ? etc…
Voilà pourquoi, nous devons en urgence étudier notre histoire pour mieux comprendre les pièges qu’on leur a autrefois tendu et que l’on nous tend encore aujourd’hui ! Notre histoire est pour nous une source d’enseignement qui n’a pas de prix. Pour cela, bâtissons-nous une carapace indestructible à l’épreuve de toutes les tentatives de falsifications de nos soi-disant amis ! Le débat est ouvert ! Merci à tous…
Sylvia B. :
Merci pour ces éclaircissements…