( Grotte d’Ouvéa )
Vie tranquille des Kanak ( les autochtones ) avant l’arrivée des Blancs ( les colons ).
La situation se dégrade pour les Kanak, comme d’habitude lors d’une colonisation blanche :
Massacres, Racisme, Apartheid, Assassinats… etc…[page]
( Répression de la révolte de 1878 )
La Nouvelle-Calédonie comptait entre 60 000 et 100 000 habitants en 1853 quand la France prit possession de ce territoire. Les Kanak n’étaient plus que 20 000 en 1920. La faute en incombe à l’irruption des Blancs, aux révoltes, à la répression violente et aveugle, aux nombreux suicides et à l’alcool qui cachent un désespoir infini, ainsi qu’aux armes à feu qui sont en libre circulation.
C’est la seconde guerre mondiale qui fait entrer la Nouvelle-Calédonie dans le monde moderne. L’installation, en 1942, du général américain Patch et du million de GI qui transiteront sur cette île, puis le retour des tirailleurs kanak du bataillon du Pacifique font apparaître les contradictions de ce territoire.
En 1945, le droit de vote est ainsi accordé à 1 144 Mélanésiens, les anciens combattants, les chefs de tribus et les pasteurs. Un an plus tard, les Kanak obtiennent la liberté de résidence et de travail sur l’île.
Ils peuvent enfin circuler à leur guise, de jour comme de nuit. Le travail forcé est aboli et le code de l’indigénat est supprimé le 5 avril 1946…
Le 5 mai 1988 : c’est l’assaut de la grotte d’Ouvéa en Nouvelle Calédonie. Ce jour-là, l’armée française attaque la grotte d’Ouvéa occasionnant 21 morts ( 19 kanak tués dans l’assaut ou massacrés ensuite, 2 militaires ).[page]
Le Terme « Kanak »…
En 2015, les Kanak représentent 39% de la population et sont la plus importante communauté de la Nouvelle-Calédonie devant les Européens ( 27,2% ), selon les chiffres publiés par l’Institut de la statistique et des études économiques ( ISEE ).
Entre 2009 et 2014, la population mélanésienne est passée de 99 100 à 104 958 personnes et la population européenne de 71 700 à 73 199 personnes.
Kanak ou canaque est le nom utilisé pour désigner les populations autochtones mélanésiennes de Nouvelle-Calédonie dans le Pacifique Sud. Le terme de « kanak » vient de l’hawaïen kanaka signifiant
« homme », « être humain » ou « homme libre ».
Le terme se généralisa au XIXe siècle, à l’initiative des premiers navigateurs et marchands européens, sous la graphie « canaque » en français ( Kanaka en anglais ) à l’ensemble de l’océan Pacifique, pour désigner plus particulièrement les populations autochtones de ce qu’on appelle traditionnellement la Mélanésie.
Toujours est-il que le terme « canaque », lié dans cette graphie à l’imagerie coloniale, prit peu à peu un sens plus ou moins péjoratif pour ne désigner que les populations autochtones de Nouvelle-Calédonie.
À partir des années 1970, les autochtones se le réapproprièrent en le « re-océanisant » sous la graphie
« kanak ».
Le terme est aujourd’hui empreint d’une forte charge identitaire et est devenu l’un des symboles des revendications culturelles et politiques des néo-calédoniens autochtones.[page]
Quelques personnages historiques et politiques Kanak…
Jean-Marie Tjibaou : dirigeant fondateur du FLNKS ( Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste ) qui a théorisé l’idée d’identité kanake et le principe d’indépendance kanake socialiste, vice-président du conseil de gouvernement de 1982 à 1984, président du conseil de la Région Nord de 1985 à 1988, président de l’Union calédonienne de 1986 à 1989, assassiné en 1989.
Éloi Machoro : figure du FLNKS et de l’activisme indépendantiste dans les années 1980, tué lors d’une opération de gendarmerie visant à libérer l’habitation d’un Européen, près de Canala, que Machoro et d’autres militants kanaks occupaient.
Yeiwéné Yeiwéné : figure du FLNKS et de l’Union calédonienne, président du conseil de la Région des Îles Loyauté de 1985 à 1988, assassiné en 1989.
Paul Néaoutyine : indépendantiste, président du FLNKS de 1990 à 1995, chef de file de l’UNI et du Palika, président de l’Assemblée de la Province Nord depuis 1999.
Rock Wamytan : indépendantiste, président du FLNKS de 1995 à 2001 et de l’UC de 1999 à 2001, président du Congrès en 2011, de 2011 à 2012 et de 2013 à 2014.
Pascal Naouna : indépendantiste, président de l’UC de 2001 à 2004.
Charles Pidjot : indépendantiste, neveu de Rock Pidjot, président de l’UC de 2007 à son décès en 2012.
Daniel Goa : indépendantiste, président de l’UC depuis 2012.
La Nouvelle Calédonie…
C’est un territoire d’Océanie à 1 500 km à l’est de l’Australie. L’archipel comprend une île principale, la Grande Terre ( 400 kilomètres du Nord au Sud, 50 à 70 kilomètres d’Est en Ouest ) et plusieurs ensembles d’îles plus petites, les îles Belep, l’île des Pins au sud, les îles Loyauté à l’est ( Ouvéa, Lifou, Tiga et Maré ), l’archipel des îles Chesterfield et les récifs de Bellone. Les Kanak représentent les populations autochtones.
De 1841 à 1847 des religieux y prennent pied ( en particulier frères maristes catholiques ). Chassés, ils font appel à la marine française qui débarque et proclame la Nouvelle Calédonie, colonie française.
Durant un siècle, ce territoire ne reçoit pas de peuplement européen, mis à part le bagne destiné à accueillir les Communards après la répression de 1871.[page]
Le mépris total pratiqué par la France…
Ce mépris total pratiqué par la France à l’encontre des autochtones se lit dans quatre faits :
> En 1853, la population kanak est estimée à 100 000 personnes. En 1920, il n’en reste que 20000.
> L’insurrection calédonienne de 1878 est écrasée de façon sauvage.
> En 1931, des Kanaks sont exposés, dans un enclos de cases, au Bois de Vincennes, à l’occasion de l’exposition coloniale de Paris.
> Le code de l’indigénat permet aux colons une pratique d’apartheid qui chasse les kanak vers des réserves reculées.
Quelques autres méfaits des Colons…
> Le 5 décembre 1984, des Caldoches ( néo-calédoniens d’origine européenne ) tendent une embuscade dans la commune de Hienghène et tuent dix kanak dont deux frères de Tjibaou.
Les tribus dressent des barrages dans les zones rurales. Tjibaou fait lever les barrages, laissant la Justice juger les assassins et voulant poursuivre les négociations.
> Le 12 janvier 1985, deux dirigeants indépendantistes radicaux ( Eloi Machoro et Marcel Nonaro ) sont liquidés.
> Lors des élections législatives de mars 1986, la droite obtient une majorité à l’Assemblée nationale. Elle revient immédiatement sur la parole de l’Etat et le statut Pisani.
Avec l’appui des riches Caldoches, elle impose un nouveau statut non négocié de maintien au sein de la République française, qui nie les droits du peuple kanak.
> Cependant, la cause mélanésienne progresse à l’ONU : le 2 décembre 1986, l’Assemblée générale des Nations unies ( à la majorité des 3/5e de ses membres ) vote la résolution 41/41 A qui affirme « le droit inaliénable du peuple de la Nouvelle-Calédonie à l’autodétermination et à l’indépendance » et inscrit l’archipel sur la Liste des territoires non autonomes selon l’ONU.
> Le 27 octobre 1987, la Cour d’assise de Nouméa acquitte les sept responsables de la tuerie de Hienghène.[page]
> Les dirigeants de la droite française imaginent alors le pire scénario politicien possible : faire adopter le nouveau « statut » par referendum en Nouvelle Calédonie le jour du vote pour l’élection présidentielle. Cela présente deux avantages :
– minoriser les Kanak qui sont devenus minoritaires dans la population néo-calédonienne
– mettre en position difficile le candidat socialiste ( François Mitterrand ) qui sera accusé de brader le territoire national et la démocratie s’il s’oppose à la proposition Chirac ( statut Pons ).
L’assaut de la grotte d’Ouvéa…
> Pour marquer leur désaccord avec ce diktat imposé de Paris, les Mélanésiens indépendantistes décident d’un coup d’éclat juste avant le 1er tour de l’élection présidentielle : le 22 avril 1988, un groupe kanak tente une opération symbolique consistant à occuper la gendarmerie de Fayaoué.
Il s’agit d’une action politique difficile, mal préparée mais sans aucune intention de tuer au départ.
> Dans le contexte extrêmement tendu de ce mois d’avril 1988 où le peuple kanak considère que le statut Pons annonce l’ethnocide de leur peuple, de leur » coutume « , » ça a foiré » comme dira un acteur du drame. Les forces de l’ordre défendent leur caserne ; 4 militaires sont tués, 27 sont emmenés comme otages.
> Le gouvernement Chirac réagit comme s’il s’agissait d’une déclaration de guerre, l’objectif étant évidemment de gagner ainsi l’élection présidentielle française. De nombreuses unités d’élite dont le GIGN et le 11ème Choc ( services secrets ) occupent les territoires des tribus, procédant à des interrogatoires musclés, à une intimidation généralisée.
> Le 27 avril , les indépendantistes libèrent 12 otages ; cependant, ils font prisonnier le chef du GIGN
( capitaine Legorjus ), un magistrat et 6 militaires qu’ils cachent dans la grotte de Gossanah ( île
d’Ouvéa ).
> La « tuerie électoraliste » d’Ouvéa : Le 5 mai est déclenchée l’opération « Victor ». Dix-neuf Kanak et deux militaires y trouvent la mort. D’une façon qui rappelle les atrocités perpétrées par l’armée française dans d’autres conflits coloniaux.
Des témoins accusent les forces « de l’ordre » d’avoir « laissé mourir volontairement » ou exécuté sommairement plusieurs indépendantistes tombés entre leurs mains.[page]
> Ainsi d’Alphonse Dianou, chef du commando, blessé d’une balle au genou ( en fait « jambisé » ), laissé sans soins jusqu’à son décès ; ou de Patrick Amossa Waina, dix-huit ans, non-membre du commando mais retrouvé mort d’une balle dans la tête alors qu’il avait été vu vivant à la fin de l’assaut… Selon le légiste, douze des dix-neuf victimes kanak avaient été tuées d’une balle dans la tête !
( kanak exposés dans un zoo humain à Paris ; 1931. )
Pour Conclure…
Le film réalisé par Mathieu Kassovitz, l’Ordre et la Morale, sur la base d’un livre de Philippe Legorjus
( alors patron du GIGN ) :
Le film de Kassovitz évoque l’épisode le plus sanglant de l’histoire récente de « la colonie ». Le 22 avril 1988, en pleine campagne présidentielle française, un commando du FLNKS attaque la gendarmerie de Fayaoué ; quatre gendarmes sont tués puis une trentaine d’autres détenus par les indépendantistes dans la grotte de Gossanah.
L’assaut est donné le 5 mai 1988 à la veille du second tour, le candidat, Jacques Chirac, et le ministre, Bernard Pons, jouant la carte du pire à des fins électorales évidentes si l’on en croit les confidences de l’ancien responsable du GIGN, lequel souligne les possibilités de négociation existant alors et délibérément écartées par le gouvernement.[page]
Le drame d’Ouvéa fera encore des victimes un an après sa conclusion. Le 5 mai 1989, les deux premiers dirigeants du FLNKS – Jean-Marie Tjibaou et Yeiwéné Yeiwéné – se rendent sur l’île pour
« faire coutume » auprès des familles de ceux qui ont été tués et, simultanément, présenter
le contenu des récents accords de Matignon. Un proche parent d’une victime et adversaire
de ces accords, Djubelli Wéa, les abat tous les deux avant de lui-même trouver la mort.
Quelque temps auparavant, Jean-Marie Tjibaou avait écrit son point de vue sur l’assaut de la grotte :
« Le gouvernement n’a jamais voulu nous écouter. Pons a toujours refusé de nous recevoir (…), le comble et le couronnement de ce mépris, c’est l’affaire d’Ouvéa et la tuerie qui a suivi. C’est une tuerie gratuite et électoraliste pour obtenir les voix de Le Pen (…).
Les rescapés peuvent aujourd’hui témoigner et j’espère que la vérité sera faite sur ce carnage, ce massacre organisé par Chirac, Pons, Pasqua et Lafleur pour gagner les voix de droite ».
La droite et l’extrême droite caldoches entendent maintenir la loi du silence…
Bibliographie : Jacques Follorou, journaliste au Monde, co-auteur avec Philippe Legorgus, commandant du GIGN à l’époque, du livre Ouvéa, la République et la morale, paru en 2011, chez Plon.